14 mars 2007

L'alpha




















A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
A, noir corselet velu de mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

Golfes d'ombre ; E, candeurs des vapeurs et des tentes,
Lances de glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;

U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides,
Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

O, suprême Clairon plein de strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges :
- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux !

Arthur Rimbaud, Voyelles, Poésies 1870-1871, dans Arthur Rimbaud, Oeuvres complètes, correspondance, Robert Laffont, 1992.


















« Comment écrire alors que ton imaginaire s’abreuve, du matin jusqu’aux rêves, à des images, des pensées, des valeurs qui ne sont pas les tiennes ? Comment écrire quand ce que tu es végète en dehors des élans qui déterminent ta vie ?
Comment écrire dominé ?
L’unique hurlement est en toi.
Un cri fixe qui te pourfend chaque jour : il s’oppose à ces radios, à ces télévisions, à ce monologue d’images occidentales fascinantes ; il refuse cette aliénation active au Développement dans laquelle les tiens ne sentent même plus que leur génie intime est congédié.
Un cri roide chaque jour.
Un silencieux tocsin. »
Quatrième de couverture de Ecrire en pays dominé, de Patrick Chamoiseau (Gallimard, 1997).

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bernard a dit…
Un petit bonjour d'Heure-le-Romain, d'où je scrute toujours avec régularité et émotion ce blog intensément poétique!
Embrasse les tiens,
Bien cordialement,


Bernard

P.S. J'ai également entamé un petit blog, sans doute fort naïf au regard du tien, mais soit, j'y ai également mis un lien vers le tien!
http://voyagesdupantouflard.blogspot.com/

16 mars, 2007