20 juillet 2006

Le chemin



Les savoirs sont dans le ventre les uns des autres, ils sont mêlés comme des chemins de vaches.
Proverbe ouest-africain

µ

Caminante, son tus huellas
el camino, y nada mas ;
caminante, no hay camino,
se hace camino al andar.
Al andar se hace camino,
y al volver la vista atras
se ve la senda que nunca
se ha de volver a pisar.
Caminante, no hay camino,
sino estelas en la mar.
Antonio Machado, Chant XXIX Proverbios y cantarès, Campos de Castilla, 1917.


Marcheur, ce sont tes traces
ce chemin, et rien de plus ;
Marcheur, il n'y a pas de chemin,
Le chemin se construit en marchant.
En marchant se construit le chemin,
Et en regardant en arrière
On voit la sente que jamais
On ne foulera à nouveau.
Marcheur, il n'y a pas de chemin,
Seulement des sillages sur la mer.
Traduction de José Parets-LLorca



A l’origine, le mot méthode signifiait cheminement. Ici, il faut accepter de cheminer sans chemin, de faire le chemin dans le cheminement. Ce que disait Machado : Caminante no hay camino, se hace camino al andar. La méthode ne peut se former que pendant la recherche ; elle ne peut se dégager et se formuler qu’après, au moment où le terme redevient un nouveau point de départ, cette fois doté de méthode. Nietzsche le savait : « Les méthodes viennent à la fin ». Le retour au commencement n’est pas un cercle vicieux si le voyage, comme le dit aujourd’hui le mot trip, signifie expérience, d’où l’on revient changé. Alors, peut-être, aurons-nous pu apprendre à apprendre à apprendre en apprenant. Alors, le cercle aura pu se transformer en une spirale où le retour au commencement est précisément ce qui éloigne du commencement. C’est bien ce que nous ont dit les romans d’apprentissage de Wilhem Meister à Siddharta.

Edgar Morin, La Méthode, t. 1, Paris, Seuil.

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